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Carnet d'Aubigny-sur-Nère
29 mai 2006

L'Auld Alliance

auld_alliance_treaty_p_web1En 1328, le décès du roi Charles IV ouvra une succession difficile. Lors des deux précédentes successions[1], en l'absence d'héritier mâle, la couronne revint au frère du roi, au nom de la loi salique. Trois candidats pouvaient prétendre à la régence (la reine Jeanne d'Evreux était enceinte). Philippe d'Evreux, fils de Louis d'Evreux, cousin germain des derniers rois, époux de Jeanne de France (unique fille du roi Louis X et écartée du trône) et frère cadet de la reine Jeanne, était le tuteur désigné de l'enfant royal. Cependant, son jeune âge, son inexpérience politique et son caractère réservé firent qu'il ne sut faire prévaloir ses droits. Le jeune roi d'Angleterre, Edouard III, fut le plus proche parent par le sang des derniers souverains, étant le fils d'Isabelle de France, unique fille de Philippe le Bel. Mais il était trop loin pour faire prévaloir à temps ses droits et, de plus, sa mère ne fut guère appréciée en France. Le choix des barons se porte sur un cousin du roi défunt, Philippe de Valois, fils de Charles de Valois qui joua un rôle influent sur la politique de ses neveux. La reine Jeanne accoucha d'une fille. Edouard III prétendit encore une fois au trône de France mais les barons et les pairs de France choisirent unanimement Philippe de Valois, devenu Philippe VI. Dès lors le conflit franco-anglais, à l'origine une querelle féodale[2] s'aggrava en une guerre dynastique. Après avoir prêté hommage en 1329 à Amiens, Edouard III se récusa et refusa de reconnaître Philippe VI. Cependant, les deux parties ne s'affrontèrent pas directement. En France, Philippe VI veillait sur les préparatifs d'une croisade en Terre Sainte tandis qu'en Angleterre, Edouard III voulait conquérir le royaume d'Ecosse.

L'affaire écossaise envenima le conflit. La France et l'Ecosse étaient liés par une "Vieille Alliance" ou Auld Alliance, que la légende fait remonter à Charlemagne. Charles Le Chauve reçut une délégation écossaise et Saint Louis fit appel aux seigneurs d'Ecosse pour l'accompagner en croisade. Le roi conseilla son fils, Philippe III le Hardi : "beau-fils, je te prie que tu te fasses aimer du peuple de ton royaume ; car vraiment j'aimerais mieux qu'un Ecossais vint d'Ecosse et gouvernât le peuple du royaume bien et loyalement que si tu gouvernais mal". Ces liens historiques furent renforcés par un traité ratifié en 1295. Charles IV confirma ce pacte d'alliance avec le roi d'Ecosse, Robert Bruce, par le traité de Corbeil (1326), qui fut renouvelé à maintes reprises comme en 1371 entre Robert II d'Ecosse et Charles V.

En 1333, Edouard III conquit le sud de l'Ecosse et se prépara de marcher sur Edimbourg. Malgré le traité de mai 1333 qui devait assurer la neutralité de la France, Philippe VI refusa d'abandonner ses alliés. Devant les préparatifs anglais pour l'ultime campagne écossaise (printemps 1336), Philippe VI annula sa croisade et transféra sa flotte dans les ports de Normandie et de Flandres. La guerre ne s'engagea de manière décisive qu'en 1340 par la victoire navale anglaise de l'Ecluse (près de Bruges). Grâce à ses archers et aux mercenaires gallois, l'armée anglaise remporta des victoires décisives comme celle de Crécy (1346), qui amena la prise de Calais, puis celle de Poitiers (1356) où le roi Jean II le Bon (1350-1364) fut fait prisonnier. L'annonce de la défaite et de la captivité du roi provoqua dans tout le royaume un mouvement de stupeur puis de révoltes comme celui des bourgeois de Paris, dirigés par Etienne Marcel, ou de Charles le Mauvais, roi de Navarre. Pendant l'été 1356, les Anglais sous la direction de Jean Chandos et John Audley, au service d'Edouard, prince de Galles, le Prince Noir, s'emparèrent d'Aubigny et l'embrasèrent.

Le Berry, qui se trouvait dans une région frontière, fut érigé en duché-pairie et offert au troisième fils du roi Jean le Bon, Jean de France, connu sous le nom de duc Jean de Berry (-). Après une captivité en France, le duc prit possession de l'apanage. Il réorganisa son duché puis mena une lutte contre les Anglais. Il obtint le comté de Poitou (1373) et le gouvernement du Languedoc (1380-1388).

Le Dauphin[3] Charles, futur roi Charles V (1364-1380) parvint à rétablir la paix intérieure et refouler les Anglais. Il instaura un gouvernement stable et fort. Sur le plan militaire, le roi refusa le combat, laissant les Anglais lancer des raids à travers le royaume. A la mort de Charles V, les Anglais ne possédaient que quelques enclaves importantes, autour de Calais et de Bordeaux.

Sous le règne de Charles VI (1380-1422), les rivalités des princes, oncles ou frères du souverain (Jean de Berry, Louis d'Orléans, Philippe le Hardi puis Jean sans Peur de Bourgogne), les graves difficultés financières (les caisses vides et le pays pressuré d'impôts), puis la folie du roi à partir de 1392, suscitèrent des guerres civiles. Deux partis s'affrontèrent, les Armagnacs et les Bourguignons. Le duc Jean de Berry se rangea tantôt dans l'un ou l'autre parti selon ses intérêts; il traita même avec les Anglais auxquels il promettra de livrer la Guyenne (1412). Cette trahison amena le siège de Bourges et la capitulation du duc. A sa mort (1417), le Berry revint au dauphin Charles. Le nouveau roi d'Angleterre, Henri IV de Lancastre (1399-1413), consolida son pouvoir à l'intérieur de son royaume et son fils, Henri V (1413-1422) reprit l'offensive contre la France. A Azincourt (1415), l'armée française, privée des troupes du parti bourguignon, fut anéantie ; maints princes de sang furent tués ou prisonniers. L'assassinat du duc de Bourgogne, Jean sans Peur (1419), jeta les Bourguignons vers le parti anglais. 

Après la défaite d'Azincourt, le dauphin Charles se tourna vers les Ecossais. Le duc d'Albany répondit à sa demande. En 1419, un premier corps d'expéditionnaire, d'environ cinq mille hommes, commandé par son fils, Jean Stewart[4], comte de Buchan[5], avait pour mission de se cantonner dans le sud de la Loire pour empêcher toute jonction des troupes anglaises entre la Normandie et la Guyenne. 

En 1420, la situation s'empira. Par le traité de Troyes, Charles VI dut déposséder son fils, le dauphin Charles, au profit du roi d'Angleterre, Henri V, qui obtint la main de la princesse Catherine de France, fille de Charles VI et la couronne de France pour ses descendants. Le royaume de France fut divisé en deux : le royaume anglo-français, qui avait pour capitales Paris et Rouen, bénéficiait du soutient des Bourguignons, des princes du Nord et surtout de Paris. Le royaume du Dauphin Charles regroupait ses propres terres (Touraine et Dauphiné) et celles de duc de Berry (Berry, Poitou, Languedoc). Ce fut surtout la fidélité des princes des maisons d'Anjou, d'Orléans de Bourbon qui permit au Dauphin de résister à l'Anglais.

[1]  Ce fut le cas de Philippe V en 1316 et de Charles IV en 1322.

[2] Le roi d'Angleterre, Edouard II de Plantagenêt, refusa à prêter hommage au roi de France, Charles IV le Bel, pour ses fiefs sur le continent; d'où la guerre dite de Guyenne (1324-1327).

[3] Titre que porte les aînés des rois de France depuis qu'Humbert, le dernier dauphin de Viennois, vendit le Dauphiné au fils aîné de Jean de Normandie, le futur Charles V.

[4] Dans cette étude, nous utiliserons l'orthographe écossaise Stewart pour désigner les membres écossais et l'orthographe française Stuart pour les Stewart installés en France ou ayant adopté la nationalité française. Walter Fitzalan (m. 1346) adopta comme patronyme Stewart qui dérive de son titre High Steward (Grand Sénéchal) que lui conféra le roi d'Ecosse, David Ier. Le W n'étant pas utilisé au Moyen Age en France, le nom fut francisé en Stuart.

[5] John Stewart (1380-Verneuil, 17.08.1424), comte de Buchan, fils de Robert (1339-03.12.1420), duc d'Albany et Régent d'Ecosse et le petit-fils du roi Robert d'Ecosse. En récompense des services rendus, Charles VII le fit Connétable (04.04.1424) après la victoire de Baugé et l'offrit les terres de Châtillon. Il trouva la mort à la bataille de Verneuil (août 1424) à la tête d'une armée massivement constituée d'Ecossais.


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Carnet d'Aubigny-sur-Nère
  • A Antonin Kempf pour l'aider à mieux découvrir sa nouvelle ville d'adoption. Ce carnet d'Aubigny-sur-Nère n'est pas un journal au quotidien d'un albinien mais le journal de voyage d'un "étranger" de passage qui a été séduit par le charme de cette citée.
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